Histoire Des Vampires
et Des Spectres Malfaisans Avec un Examen du Vampirisme by Collin de Plancey Histoire des Vampires
Seconde Partie. Vampires Plus Récens. (160) CHAPITRE IX.
Histoire de trois Vampires de Hongrie. Vers l'an 1725, un soldat qui était en garnison chez un paysan des frontières de la Hongrie, vit entrer, au moment du souper, un inconnu, qui se mit à table auprès du maître de la maison: celui-ci en fut extrêmement effrayé, de même que le reste de la compagnie. Le soldat ne savait qu'en juger, et craignait d'être indiscret en faisant des questions, parce qu'il ignorait de quoi il s'agissait. (161) Mais le maître du logis étant mort le lendemain, il chercha enfin à connaître le sujet qui avait produit cet accident et mis toute la maison dans le trouble. On lui dit que l'inconnu, qu'il avait vu entrer et se mettre à table au grand effroi de toute la famille, était le père du maître de la maison; qu'il était mort et enterré depuis plus de dix ans et qu'en venant ainsi s'asseoir au prés de son fils, il lui avait apporté la mort. Le soldat raconta toutes ces choses à son régiment. On en avertit bientôt le officiers généraux, qui donnèrent commission au comte de Cabreras, capitaine d'infanterie, de faire information de ce fait. Le comte de Cabreras s'étant transporté sur les lieux avec d'autres officiers (162) un chirurgien et un auditeur, ils entendirent les dépositions de tous les gens de la maison, qui attestèrent que le revenant était père de l'hôte du logis, et que tout ce que le soldat avait rapporté était exactement vrai: ce qui fut aussi affirmé par la plupart des habitans du village. En conséquence on fit tirer de terre le corps de ce spectre: son sang était fluide et ses chairs aussi fraîches que celles d'un homme qui vient d'expirer. On lui coupa la tête; après quoi on le remit dans son tombeau. On exhuma ensuite, après d'amples informations, un homme mort depuis plus de trente ans, qui était revenu trois fois dans sa maison à l'heure du repas, et qui avait sucé au cou, la première fois, son propre frère, la (163) seconde un de ses fils, la troisième un valet de la maison; tous trois en étaient morts presque sur-le-champ. Quand ce vieux Vampire fut déterré on le trouva, comme le premier, ayant le sang fluide et le corps frais. O lui planta un grand clou dans la tête, et ensuite on le remit dans son tombeau. Le comte de Cabreras fit brûler après cela un troisième Vampire, qui était enterré depuis plus de seize ans, et qui avait sucé le sang et causé la mort a deux de ses fils. --Alors enfin le pays fut tranquille (1). (1) D. Calmet déclare qu'il tient ces faits d'un particulier, qui lui a déclaré qu'il les tenait de M. le comte de Cabreras. |